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Sylvestre Coudert
Président des Experts Forestiers de France (EFF - MEMBRE ASSOCIÉ DE PEFC FRANCE)
Pouvez-vous vous présenter ainsi que votre organisation et ses missions ?
Je suis expert forestier de profession et par ailleurs Président des Experts Forestiers de France (EFF) dont la mission principale est de représenter notre profession au niveau national. En tant qu’experts forestiers, notre rôle est d’assurer une gestion indépendante des patrimoines forestiers et de conduire des expertises, audits et évaluations sur la forêt et le bois. Nous sommes ainsi en interface régulière avec le propriétaire forestier (qu’il soit privé ou institutionnel) mais aussi avec les industriels du bois. Notre métier est d’analyser les capacités d’une forêt dans son contexte de production tout en s’assurant de sa gestion durable. A ce titre, notre sensibilité à PEFC est particulièrement forte.
Comment la certification PEFC vous accompagne-t-elle dans votre activité ?
La certification PEFC nous accompagne au quotidien. En effet, nous sommes au contact tous les jours des propriétaires forestiers et dans ce cadre la certification forestière fait partie intégrante des critères de suivi des forêts et des parcelles forestières que nous gérons et expertisons. C’est aussi le cas parce que nous sommes en lien avec les industriels qui achètent la matière bois, qui ont aussi besoin de ce suivi de la chaîne de certification pour garantir une qualité de gestion durable et un suivi de qualité des produits qui sont issus des forêts que nous avons en gestion. Nous sommes donc en lien permanent avec PEFC.
Plus que cela, nous sommes même des promoteurs de PEFC dans le sens où nous encourageons les propriétaires forestiers à mettre sous certification PEFC leurs parcelles forestières. Nous la mettons par ailleurs en valeur notamment lors des ventes de bois. Dans le cadre de ventes groupées par exemple, nous indiquons systématiquement quels sont les lots qui sont PEFC ou qui ne le sont pas, ce qui est aussi un gage de garantie pour des acheteurs de bois.
Que retenez-vous de l’événement Tous Mobilisés pour l’#EquilibreForestier ?
Lors de cet évènement, je me suis retrouvé à échanger avec des environnementalistes. Le débat était particulièrement intéressant. J’ai pu plus spécifiquement discuter avec un représentant de FNE auprès de PEFC, par ailleurs ancien ingénieur forestier au sein du CRPF. Son profil de forestier averti doublé d’un engagement sociétal et environnemental fort a rendu l’échange très intéressant. L'événement a également été l’occasion d’échanger avec une ingénieure forestière travaillant pour un PNR. Ce qui était intéressant est que nous avions tous les trois le même langage puisque issus de formation forestière et des compétences techniques communes tout en ayant un prisme d’orientation différent. Nous avions tous les trois un intérêt commun à ce que la gestion durable se fasse mais en arrivant chacun avec une vision liée à nos fonctions et activités au quotidien très différentes. Un échange vraiment constructif !
Cet événement a été organisé comme un premier pas en amont de la révision du cahier des charges qui aura lieu cette année. Avez-vous des attentes particulières vis-à-vis de celle-ci ?
La forêt reste vivante et nous devons, nous membres de la filière, évoluer et nous adapter au quotidien vis-à-vis des changements que connaît la forêt, notamment climatiques. Mais notre échelle de temps est celle du long terme et les évolutions doivent donc pouvoir se faire de façon posée, raisonnée et raisonnable. A titre d’exemple, la diversité dans le reboisement est quelque chose qui nous porte, nous experts forestiers. Nous sommes évidemment persuadés qu’il faille évoluer de façon la plus diversifiée possible pour que les forêts soient les plus pérennes possibles. Néanmoins, si nous considérons le débat concernant les coupes rases, il faut rappeler que nous avons des héritages de forêts régulières. Face à cet héritage, nous sommes donc contraints de poursuivre ce modèle pour des forêts qui ont été structurées de cette manière et qui aujourd’hui arrivent à des fins de cycles. On évolue sur les méthodes de gestion, sur les modes d’intervention mais tout ça se fait de façon progressive et ne peut pas se décider de façon brutale et forcée. En parallèle, nous devons aussi répondre à une attente économique de la forêt tant pour le producteur que pour l’industrie au moment où la filière bois n’a jamais été aussi mise en valeur et où le matériau bois retrouve ses lettres de noblesse dans tous les domaines. Il ne faut pas rater ce virage extraordinaire que nous propose la forêt et le bois.
Plus que jamais, la tension entre attentes sociétales et demandes économiques est présente. En tant qu’experts forestiers, nous le constatons au quotidien. Mais ces débats importants peuvent parfois glisser sur des conflits extrêmes avec des forestiers qui peuvent se sentir agressés alors même qu’ils sont engagés au quotidien pour une gestion toujours plus durable de leur forêt. Il est donc nécessaire de recréer les conditions d’un débat sain et serein. Et de faire confiance aux spécialistes et professionnels que nous sommes, nous experts forestiers mais aussi au reste des acteurs de la filière. Le Forum 2021 de PEFC devra être ce moment permettant de réconcilier attentes sociétales et demandes économiques car la logique de gestion durable doit être la clé de toutes les actions que nous menons. Nous vivons un beau moment pour la filière forestière même si elle souffre de nombreuses problématiques. Ce challenge nous devons le prendre à bras le corps avec toutes les parties prenantes.